Comprendre l’intelligence et son rôle en psychologie
Suis-je intelligent(e) ?
Mon enfant est-il surdoué ? La fille des voisins redouble pour la seconde fois… Dans la société de performance individualiste qui est la nôtre, la question de l’intelligence nous interpelle. En particulier durant la scolarité de nos enfants qui est souvent vécue comme une course à l’excellence, ou, à l’inverse, comme une peur, un rejet, de l’école.
Mais qu’est-ce que l’intelligence, exactement ?
Selon Le Petit Larousse, il s’agit d’une « faculté de comprendre, de saisir par la pensée », mais aussi d’une « aptitude à s’adapter à une situation » ou encore de « donner un sens à quelque chose ».
En psychologie, il existe plusieurs théories de l’intelligence différenciées selon qu’elle soit vue comme un facteur général qui influence les différentes compétences (raisonner, décider, résoudre des problèmes…) ou comme une somme de compétences distinctes.
On voit qu’il est difficile de trouver une définition simple et consensuelle de l’intelligence. Nous parlons en fait le plus souvent des compétences offertes par notre capacité de penser, par notre conscience… c’est-à-dire de ce que l’on pourrait qualifier d’intelligence abstraite.
Mais qu’en est-il de tous ces artistes, artisans et autres sportifs qui se réalisent par leur corps ? Ne seraient-ce pas également des aptitudes qui sont guidées par le même organe : le cerveau ? N’y a-t-il pas là une autre forme d’intelligence, plus pratique ?
L’inné et l’acquis
Ce débat ancien est aujourd’hui désuet. Certes, notre naissance et notre héritage biologique nous fournissent un équipement biologique déterminé. Mais celui-ci est comme la graine d’une plante : empli d’un potentiel, c’est-à-dire d’une promesse qui ne sera réalisée que si ses conditions de développement lui permettent d’exprimer ce potentiel.
Or, qu’est-ce qui peut influencer ce développement ? Dans le parcours de vie d’un individu, ces facteurs peuvent être nombreux et variés : maladie ou handicap pourront freiner son développement d’une manière générale, influençant ainsi négativement ses capacités intellectuelles (de fréquents séjours à l’hôpital par exemple peuvent empêcher l’enfant de se consacrer suffisamment à sa scolarité) ou bien l’atteinte peut concerner directement les fonctions intellectuelles : une dyslexie (trouble de l’apprentissage de la lecture), une dysphasie (trouble de la communication verbale d’expression et/ou de compréhension), par exemple, entravent les processus d’apprentissage en privant l’enfant des instruments de cet apprentissage.
Mais de nombreux autres facteurs interviennent également, et de façon moins flagrante : l’environnement familial, l’environnement social, la culture de manière générale. Ainsi, un enfant privé de stimulations verra décliner ses facultés : on peut citer ainsi l’exemple des orphelins roumains qui avaient défrayé l’actualité dans les années 90 : ces enfants, livrés à eux-mêmes, sans aucune stimulation sensorielle, intellectuelle ou affective, montraient des caractéristiques d’arriération mentale et d’autisme.
Or, sortis de ces orphelinats et remis dans des contextes familiaux « normaux », ils ont vu une reprise de leur développement, tant physique qu’intellectuel. De même qu’un enfant dont la mère est dépressive court le risque de voir s’amoindrir, voire s’éteindre son potentiel.
A l’inverse, nos facultés intellectuelles peuvent se déployer largement lorsque le contexte de l’individu est favorable. Ainsi, par exemple, jouir d’un environnement familial chaleureux et stimulant favorise la réussite scolaire. Cette stimulation peut provenir, soit d’un niveau culturel riche qui nourrit l’enfant de connaissances, soit d’un niveau d’exigence parental suffisamment élevé qui le nourrit de motivations (les deux pouvant bien entendu coexister). Il s’agit là d’un ensemble de circonstances à la croisée du terreau, du climat et des soins apportés à la plante pour optimiser sa croissance…
Faut-il stimuler l’intelligence de nos enfants ?
Oui et non : oui, parce que la stimulation est nécessaire au développement de l’intelligence, comme nous l’avons vu plus haut. Mais il est contre-productif de sur-stimuler son enfant, car alors, ce qui le guette, c’est l’épuisement, le découragement, la démotivation.
En fait, nous pourrions dire qu’un enfant doit être stimulé à hauteur de ce qui lui convient. Cela signifie que chaque enfant a ses besoins propres, en fonction de son âge, de ses motivations, de ses goûts, de ses capacités (intellectuelles, émotionnelles etc…) et tout cela, à un moment donné de son développement. Le plus important sera donc d’être attentif à ses besoins et à ses attentes, de le nourrir en fonction de cela, et d’observer l’évolution de ces besoins qui ne restent pas les mêmes dans le temps.
Enfin, il ne faut pas se focaliser sur les activités purement intellectuelles : rien ne sert de vouloir lui faire lire le dictionnaire chaque soir ! Au contraire, le bien-être de l’esprit passe aussi par celui du corps et un enfant qui aime et a besoin de se dépenser ou de pratiquer des activités manuelles développe aussi son intelligence. En résumé, dans l’enfance, l’intelligence se développe d’abord à notre insu lorsque l’on est heureux…
Ce que mesurent les tests de QI
Le QI (Quotient Intellectuel) est, comme son nom l’indique, un chiffre.
Ce chiffre, dont le calcul est complexe, est une donnée statistique qui permet de situer le niveau d’efficience d’un individu, à un test donné, au moment où il passe ce test, par rapport à une population de référence. Ainsi, les pratiques communément admises aujourd’hui, attribuent un QI de 100 à la moitié de la population et les deux tiers environ de cette population possèdent une intelligence « normale », c’est-à-dire comprise entre 85 et 115. En dessous de la cette zone normale, on commencera à parler de retard intellectuel et au-dessus, de précocité (ou de surdoués).
Les tests d’intelligence s’intéressent à une intelligence purement abstraite : mesure du rendement, de la capacité à résoudre certaines tâches logiques à un moment donné.
Ils ne s’intéressent pas à d’autres types d’intelligence (émotionnelle, sociale…) ni au contexte socio-culturel de l’individu, ni, non plus, à sa capacité d’évolution. Par ailleurs, le plus souvent, ils nécessitent des capacités de verbalisation (ce qui en exclut les personnes atteintes de dysphasie ou celles dont le retard intellectuel ne leur permet pas de verbaliser correctement) et sont construits dans et pour un contexte culturel occidental (ce qui pose problème pour évaluer l’efficience de personnes récemment immigrées par exemple).
Ces réserves posées, ces tests sont un formidable outil des psychologues pour réaliser un bilan psychologique car ils permettent de mesurer précisément certaines aptitudes. Ils sont particulièrement adaptés dans le cadre scolaire. Cependant, considérer le chiffre brut de QI serait une grave erreur, car celui-ci doit s’accompagner d’autres évaluations et d’observations permettant d’aboutir à la description d’un profil complet et d’interprétations sur les raisons d’un dysfonctionnement.
Que penser des tests de QI trouvés dans les magazines et sur Internet ?
Ce sont des jeux, des gadgets ! Et cela, pour deux raisons : tout d’abord, comme nous venons de le voir, un test de QI isolé n’a pas de signification probante. Ensuite, et ce point est également très important, ces tests ne sont pas soumis à validation scientifique, contrairement aux tests utilisés par les psychologues. Quelle preuve avons-nous alors de leur validité ? Aucune… Et ils sont plus souvent flatteurs que ne l’est la réalité…
Enfin, précisons que seules les personnes détenant un titre de psychologue sont habilitées à faire passer de tels tests, un peu comme les médecins sont seuls habilités à délivrer des ordonnances…
Adulte, comment améliorer son intelligence ?
Non, l’intelligence n’arrête pas son développement à 25 ans…
Si le cerveau est programmé pour se développer jusqu’au début de l’âge adulte, il peut continuer à multiplier ses connexions neuronales tout au long de la vie, pour peu que celles-ci soient entretenues et développées.
Comment le faire ? Comme pour l’enfant : en entraînant ses capacités,par des exercices purement intellectuels. Les études ou le travail constituent souvent une source importante en la matière, mais aussi en continuant d’être curieux, d’aller à la découverte de ce qui nous attire, en multipliant les expériences qui nous permettent d’apprendre des choses nouvelles. Nul besoin de faire deux heures de mots croisés ou de sudoku par jour si l’on n’aime pas cela…
La question du vieillissement
Bien entendu, ce développement a des limites parce que nos conditions de vie sont rarement optimums… Et le vieillissement, malgré nos efforts, ne pourra qu’abaisser la courbe de développement au final.
Le cerveau vieillit, au même titre que le reste de nos organes. Il perd de ses capacités avec le temps, mais cette perte peut être compensée si le vieillissement ou la maladie ne sont pas les plus forts. Dans les programmes d’entretien des fonctions intellectuelles entrepris auprès de personnes âgées, même si certains portent sur des fonctions spécifiques (parce que les atteintes concernent des capacités spécifiques), en général, l’accent est mis sur le bien-être, la curiosité et la motivation de ces personnes à s’intéresser au monde qui les entoure.
Julien Bonnel pour Psychologika
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